L’histoire de la Ligue de Beauce bientôt écrite
HOCKEY. Rosaire Sylvain documente depuis 2015 le sport qui a soudé toute une région après l’arrivée du train.
«Je ne pensais jamais m’intéresser à l’histoire. Ce que j’aime c’est le hockey», raconte à la rigolade l’enseignant d’éducation physique à la retraite Rosaire Sylvain.
Tout a commencé comme toutes bonnes histoires: dans une chambre de joueurs.
Après la fin de la ligue de Beauce en 1980, M. Sylvain a continué à jouer au hockey avec ses anciens adversaires et coéquipiers. Ce n’était pas juste la belle fragrance de l’équipement qui flottait dans le vestiaire, mais les souvenirs, les images, les victoires de cette ligue, qui a marqué plusieurs générations de Beaucerons.
Et à force de s’obstiner avec eux sur les dates et les noms des joueurs, Rosaire Sylvain s’est mis en tête de mieux documenter cette ligue. «Crois-moi qu’ils ont arrêté de me contredire sur les dates, je les connaissais mieux qu’eux», explique-t-il, avec un sourire en coin.
Ce travail l’a mené une première fois en 1994, lors des retrouvailles du 250e anniversaire de la ville de Sainte-Marie, où ils ont honoré d’anciens joueurs de la ligue, dont la plupart sont malheureusement décédés dans les années suivantes.
Le déclic est vraiment venu un peu après le remplacement de sa hanche en 2015. Son opération a mis un terme à la pratique de son sport préféré. Il ne pouvait plus retourner devant les buts à garder le filet. C’est là que la nostalgie des belles années de sport amateur a embarqué. Il a par contre vite redirigé son énergie dans la recherche et la documentation de la ligue de Beauce, où il y a joué de 1967 à 1980.
Le trio parfait
M. Sylvain s’est entouré de deux alliés, aussi passionnés que lui dans cette entreprise. La retraitée de Beauceville Andrée Roy l’alimente en informations historiques. Il passe ensuite sa sélection de brochures et de photos à l’écrivain Éric Giguère qui s’occupe de la rédaction.
Les trois n’ont pas d’objectif précis. Ils y travaillent à temps perdu. Ils leur restent à passer au travers des années 60 et 70 pour compléter l’histoire de la ligue. Rosaire Sylvain aimerait voir naître un livre pour le 100e anniversaire de la Ligue de Beauce en 2019 ou 2020, un peu comme celui des Canadiens de Montréal. Mais il n’est pas prêt à investir 20 000$ pour sa publication.
Naissance d’une identité
Avant cette ligue, les équipes de hockey de Sainte-Marie, Vallée-Jonction, East-Broughton (et d’autres municipalités) avaient l’habitude de se lancer des défis. Les uns allaient visiter les autres sur leur patinoire extérieure, comme celle du Manoir Bilodeau de Beauce-Jonction (nom de Vallée-Jonction avant la création de la paroisse).
«C’était le seul sport qui se pratiquait à l’époque. On ne connaissait pas autre chose. Les notables de chaque village embarquaient dans l’organisation. C’était une occasion pour prendre un coup. Les gens prenaient une grosse ponce de gin sur le bord de la bande. L’équipe de l’extérieur était reçue à une réception. C’était la fête», décrit Rosaire Sylvain.
Cette époque de défis a pris fin lorsque l’équipe «Les Beauces de Beauce-Jonction» s’est déclarée championne, après avoir vaincu toutes ses rivales. «Ça l’a allumé le feu», raconte M. Sylvain. C’est lors de l’hiver 1919-1920 que la ligue est vraiment née.
Les belles années
De cinq à six équipes participaient à la ligue de Beauce. Certaines venaient d’aussi loin que Saint-Sébastien pour jouer au hockey. Labatt a même commandité la ligue qui a porté le nom de sa bière de 1962 à 1965. Le comté de Dorchester s’est aussi joint au championnat dans les années qui ont suivi.
«Peu de gens savent qu’auparavant le champion de la ligue de Beauce affrontait les champions de la ligue des Bons Sports à l’aréna des Bulldogs du parc Victoria dans les années 30», ajoute l’ancien gardien de but.
La ligue s’est essayée pendant deux saisons en 1953-1954 et 1954-1955, à payer ses joueurs. Le record d’assistance du Colisée de Québec était détenu par cette série dans laquelle s’affrontait L’Éclaireur de Beauceville et le Baronet de Sainte-Marie. Les journaux ont rapporté que 47 000 personnes ont rempli les gradins.
Rosaire Sylvain garde quelques surprises pour le projet final. Il a déniché des joueurs qui se sont illustrés dans la Ligue nationale et d’autres qui ont carrément refusé d’y jouer, parce que tout se faisait en anglais.