Les producteurs et productrices acéricoles affichent leur impatience
ACÉRICULTURE. Pendant que le Québec célèbrait la première édition de la Journée nationale de l’érable, le 20 octobre dernier, les Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ) continuent de réclamer davantage de place dans les forêts publiques de la province.
Le regroupement soutient que le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) tarde à livrer la marchandise dans ce dossier et menace l’avenir de la production du sirop d’érable, résume le président des PPAQ et acériculteur à Saint-Nazaire dans Bellechasse, Luc Goulet, qui déplore aussi le manque de supervision dans l’exploitation forestière, en général.
« Nous avons commencé les discussions avec le gouvernement depuis quatre ans et il y a encore des prescriptions sylvicoles qui sont faites pour produire du bois et non pour conserver le potentiel. On va chercher des 35 ou 45 % de prélèvement, alors qu’il reste très peu d’érable, et on enlève cette possibilité d’exploitation acéricole. Ils sont revenus à ce qui était décrié il y a 25 ans », résume-t-il.
Globalement, les PPAQ souhaiteraient obtenir 25 000 hectares pour le court terme et 35 000 hectares pour le long terme. « Il faut que ce soit planifié, car actuellement nous sommes en deçà du 10 000 hectares qui était dans le plan directeur. Il faut faire de la foresterie qui soit adaptée et qui respecte le potentiel. Souvent, ces superficies sont près ou autour d’érablières existantes. Une fois que l’industrie forestière a fait ses aménagements, ces superficies ne se qualifient plus comme érablières », ajoute M. Goulet.
Chaudière-Appalaches parmi les exceptions
La région de Chaudière-Appalaches fait un peu figure d’exception puisqu’il y a peu de superficies à exploiter en terres publiques, précise Luc Goulet, tandis qu’ailleurs, de la cohabitation et de très beaux potentiels sont observés. En Chaudière-Appalaches, les secteurs qui pourraient être exploités davantage sont situés généralement près de la route 281 à Armagh et jusqu’à Saint-Pamphile, mais aussi ailleurs sur le territoire, indique-t-il.
« Il y a beaucoup de terres publiques dans ce secteur et déjà des érablières en opération. La Zec Jaro en est un autre, mais nous avons été bloqués par différentes personnes sous le prétexte qu’on viendrait en compétition avec les aires de confinement du chevreuil, ce qui n’est pas le cas. La Seigneurie Joly est un autre exemple où les producteurs sont enclins à avoir des compromis d’aménagement pour préserver la biodiversité. Ce ne sont pas de grandes superficies, mais ça permettrait à certains de consolider ce qu’ils ont déjà », résume-t-il.
Globalement, 18 à 20 % des entailles à l’heure actuelle sont en terres publiques, évalue M. Goulet, qui estime que le potentiel acéricole exploitable est de 436 000 hectares de forêt à l’échelle du Québec. « Là-dessus, il y en a peut-être 225 000 ou 250 000 qui sont attitrés. Nous avons déposé un plan directeur en avril 2023. Un plan d’action l’accompagnait et un seul élément de l’ensemble du document a avancé, soit l’augmentation de la tarification des érablières. Tout ça vient en plus de tout le volet administratif avec les ministères qui a des retards. Il y a des entailles de 2021 où les producteurs n’ont pas encore eu de permis. Le ras-le-bol est complet. »
Manque de clarté
Luc Goulet observe aussi des différences dans une région à une autre dans la façon d’appliquer les choses. « Il faut que les directives soient claires dans chacune des régions. Il y a des mini-gouvernements dans les ministères et c’est le cas en région. Nous avons demandé d’avoir des directives provinciales pour uniformiser tout ça. Il y a des régions où ça s’est très bien passé sur les terres publiques, car les directions régionales étaient uniformes dans le développement », explique-t-il.
Revenant sur la Journée nationale de l’érable, soulignée au cours des derniers jours, celui qui représente l’ensemble des producteurs et productrices acéricoles de la province aimerait voir davantage de cohérence dans les agissements des fonctionnaires, mais surtout de la Coalition Avenir Québec (CAQ), tout en soulignant le travail du député de Beauce-Sud, Samuel Poulin, qui a initié la création de cette journée.
« Il a accompagné des producteurs au niveau de la Zec Jaro et je ne veux rien lui enlever, sauf que la volonté politique, c’est le gouvernement de la CAQ. Ce sont eux qui ont lancé cette journée. Le sirop d’érable est une fierté au Québec et on devait appuyer cette filière, sauf que ça ne se fait pas. On a besoin d’engagements plus fermes et de directives plus fermes de la part du gouvernement. »
Il a d’ailleurs à maintes reprises visé la ministre Maïté Blanchette-Vézina au cours des dernières semaines. « La responsabilité revient à la personne qui dirige le ministère des Ressources naturelles. Elle a un rôle à assumer. Je comprends qu’il doit y avoir de la cohabitation sur les terres publiques, on ne nie pas ça, sauf que l’industrie forestière était la seule à opérer dans les forêts avant. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il y a la villégiature, le tourisme, la chasse, la pêche, puis il y a nous les acériculteurs et il faut que l’on nous reconnaisse et que nous avons un apport économique important », ajoute-t-il en résumé.